Le renard, dont la description physique est superflue, personnifie, du point
de vue moral, la ruse et la circonspection dans le monde animal, cette
réputation n'est pas absolument justifiée, car le renard la doit surtout sa
physionomie et l'acuité de ses sens. Pour le chasseur, cette réputation,
jointe celle que le renard s'est acquise comme destructeur de gibier et de
volaille, a fait de maitre Goupil un ennemi que l'on cherche à anéantir par
tous les moyens. Bien que cette réprobation soit en partie fondée, elle est
cependant très exagérée. Le régime du renard varie suivant les saisons, les
régions, et aussi suivant les individus. Pendant la plus grande partie de
l'année, il se nourrit surtout de mulots, de campagnols, de souris, mais aussi
de grenouilles, d'insectes (de bousiers principalement), d'écrevisses,
d'escargots, voire de charognes. Il adjoint à ce menu des oeufs, des oiseaux,
des fruits et, lorsque l'occasion se présente, des pièces de gibier. A l'époque
de la reproduction, les choses vont tout autrement l'obliger de subvenir aux
besoins de sa famille, il s'empare alors de la volaille jusque dans les cours de
ferme. Outre les lapins et les lièvres, il capture faisans et perdreaux et
s'attaque même aux chevrillards, malgré les coups de pied que lui prodiguent les
chevrettes, et dont il est parfois la victime. Lorsqu'une éaisse couche de
neige recouvre le sol, il poursuit parfois les chevreuils adultes, qui se
blessent sur la croûte gelée, il finit par les rattraper et les dévore tout
vivants. Durant la nuit, et quelquefois de jour, les renards se groupent par
deux - soit deux camarades, soit un mâle et une femelle - pour chasser: tandis
que l'un d'eux suit le lièvre ou le lapin en donnant de la voix, l'autre se
tient en embuscade à un carrefour ou dans une coulée propices. .
Il est indéniable qu'une chasse où il y a beaucoup de renards subit un gros
préjudice, mais, lorsqu'il n'y a qu'un nombre restreint de ces animaux, elle
bénéficie au contraire des avantages qu'apporte l'équilibre de la nature ,
trop peu de propriétaires de chasses et de gardes s'en rendent compte
aujourd'hui, mais il ne saurait s'écouler beaucoup d'années avant qu'ils ne s'en
aperçoivent, en France comme ailleurs.
Le rut du renard commence en janvier et se poursuit jusqu'aux premiers
jours de mars. C'est surtout à cette poque que la violente odeur musquée de
l'animal est perceptible en forêt et au coin des haies, probablement là où il a
uriné. Cette odeur est celle de la sécrétion de glandes anales, mais surtout
d'une zone glandulaire située à la base de la queue et, bien délimitée
dorsalement, à l'endroit où le poil prend souvent une teinte plus foncée.
La gestation dure environ huit semaines, la renarde, après avoir visité plusieurs terriers, en choisit un qu'elle garnit des poils qu'elle arrache
d'abord de sa poitrine, puis dans la zone des mamelles. Le nombre des renardeaux
est généralement de cinq ou six, mais il peut osciller entre trois et huit, le
nombre de douze, qui a ét éindiqu par plusieurs observateurs, doit constituer
une rare exception, à moins qu'on ne l'explique par la promiscuité de deux
femelles dans un même terrier. A leur naissance, les renardeaux sont de couleur
gris souris et très passifs, ils sont aveugles pendant une douzaine de jours et
leurs oreilles sont tombantes. Leur mère reste couchée sur ou près d'eux durant
les premiers jours, mais ensuite elle ne les visite qu'à intervalles réguliers
pour leur donner téter, se tenant le reste du temps dans un autre terrier ou
dans un coin du terrier, ou bien même dans des buissons aux alentours de
celui-ci. Les dents des renardeaux font leur apparition au bout de trois
semaines, c'est le moment où le père doit commencer à assurer le ravitaillement,
malheureusement, comme il s'en acquitte bien, cela ne va pas sans heurts avec le
garde-chasse et le fermier!
Les renardeaux grandissent rapidement et manifestent bientôt le désir de
connaître le monde extérieur, ils sortent alors du terrier, et c'est l'époque
où, par les belles ensoleillées d'avril et de mai, on peut les voir
jouer avec une grâce charmante et enfantine. Quelquefois aussi leur mère prend
part ces jeux, se rasant, puis bondissant au milieu de ses rejetons.
Si rien d'intempestif ne survient, ceux-ci resteront groupés jusqu'au début
de l'été au lieu qui les a vu naître, la mère a-t-elle au contraire l'impression
que celui-ci a été découvert ou se trouve menacé, alors elle emporte un par un
les renardeaux, par la peau du cou, dans une retraite plus sûre.
Le terrier du renard comporte trois parties distinctes: la maire, qui
constitue l'antichambre, la fosse, dans laquelle l'animal accumule ses
provisions et qui présente au moins deux issues, enfin l'accul, ou habitation
proprement dite, qui n'a qu'une seule entrée.
On ne sait pas encore d'une façon certaine si le renard est monogame ou
non, le fait qu'il ne prend aucune part, apparemment du moins, à la vie de la
famille durant les quinze premiers jours ne permet pas d'être affirmatif dans un
sens ou dans l'autre.
On a voulu classer les renards en différentes variétés suivant la couleur
de leur robe (dorés, argentés, croisés, charbonniers), mais, étant donné qu'on
trouve tous les intermédiaires possibles entre ces divers pelages, il faut
admettre qu'il n'existe qu'une seule espèce avec trois formes: une pour la
Scandinavie, une pour l'Europe centrale et une pour l'Espagne et le Portugal. En
revanche, Miller sépare le renard de Corse et de Sardaigne et en fait une espèce
distincte: Vulpes Ichnusae Miller, plus petite, avec les oreilles plus courtes.
Bien qu'en France le renard ne se voie gratifié que du terme péjoratif de
puant , il est considéré comme un animal de chasse à tir enviable en Europe
centrale, quant à nos voisins d'outre-manche, on sait en quelle haute estime ils
tiennent le renard, le fox-hunting tant un sport national et même, aux yeux de
certains, le sport par excellence. Aussi le renard est-il toléré ou même protégé
dans les îles Britanniques.
Si l'on est vulpicide par goû ou par nécessité, on se doit donc de
l' être aussi sportivement et humainement que possible, et c'est pourquoi il faut
absolument condamner l'emploi de la chloropicrine ou d'autres gaz comme moyen de
destruction.
On chasse le renard aux chiens courants, mais le plus souvent c'est pour
ainsi dire par accident, lorsqu'on cherche à attaquer un autre animal. On le
tire aussi au cours des chasses en battue.
Mon mode de chasse préféré, pour cet animal, est le
déterrage avec tout ce qu'il comporte, notamment la quête et la surveillance
du territoire de chasse avant de pouvoir localiser l'endroit où il a fait sa
portée. L'autre mode de chasse digne de ce nom pour cet animal est évidemment
la chasse à courre.
( vénerie )